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A23 • Végétal, Vrai, Varié, si possible bio, local et de saison : les 3V pour protéger la santé, les animaux et les systèmes alimentaires
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Les recherches récentes en alimentation préventive et durable montrent qu’un régime alimentaire obéit à trois règles fondamentales pour protéger à la fois la santé humaine, la biodiversité et le bien-être animal, l’environnement, les traditions culinaires, les petits producteurs et la socio-économie (alimentation de qualité accessible à tous et respectant la chaîne de valeurs du champ à l’assiette) ; et donc les systèmes alimentaires dans leur ensemble : 1) le ratio calories végétales/animales, 2) le degré de transformation des aliments, et 3) la diversité alimentaires (si possible bio, local et de saison).
Cette règle holistique (les 3V pour Végétal, Vrai, Varié), facile à s’approprier, constitue un outil moderne à actionner pour orienter les politiques agricoles à l’échelle européenne. En effet, il est bien documenté que l’excès de consommation de produits animaux et ultra-transformés à l’échelle mondiale menace la durabilité des systèmes alimentaires via le changement climatique, la perte de biodiversité, l’explosion des prévalences de maladies chroniques, la perte progressive des petits producteurs et des traditions culinaires, l’augmentation des inégalités sociales vis-à-vis de notre accès à une alimentation saine, et l’augmentation de la souffrance animale.
Les 3V pourraient donc servir de base à l’élaboration de la prochaine PAC, comme une grande orientation pour les décisions à venir :
- Comment développer à l’échelle européenne des systèmes alimentaires qui permettent de développer ce régime de type 3V ?
- Comment accompagner les agriculteurs pour développer davantage des systèmes de polycultures-élevage répondant mieux à ce régime protecteur de type flexitarien ?
- Comment éduquer la population sur les caractéristiques d’un régime préventif et durable à la fois ?
Les bases scientifiques du régime 3V sont solides et universelles. Elles renvoient aussi à l’idée de consommer de la viande de meilleure qualité mais en quantité moindre, de supprimer l’élevage intensif (créant ainsi des emplois avec un retour à l’élevage extensif), de diversifier les cultures pour développer une meilleure résilience au changement climatique et stimuler la biodiversité, d’autoriser les abattoirs itinérants pour alléger la souffrance animale, et surtout de faire des agriculteurs les acteurs de notre santé en première ligne.
Le métier d’agriculteur peut donc se diversifier pour répondre aux exigences d’une alimentation plus saine sur les plans sanitaire, nutritionnel et environnementale ; et accessible à tous quel que soit son revenu. Pour cela, la transformation des aliments devrait être relocalisée et pas confiée aux seules mains d’une dizaine de multinationales. L’agriculteur peut devenir transformateur, et la transformation des aliments doit se relocaliser en se fragmentant aux niveaux régional et local, multipliant les sites de transformation.
Je propose donc que la prochaine PAC se serve du levier holistique et robuste des 3V pour élaborer les prochaines orientations. Cette proposition n’est pas incrémentale, mais de rupture. Mais ce n’est qu’à ce prix que l’on pourra faire face aux graves crises environnementales et économiques à venir.
Plus généralement et plus philosophiquement parlant, l’enjeu est de revenir à une vision beaucoup plus holistique et intégrée de nos systèmes alimentaires, reconnaissant davantage les liens qui unissent les parties du système, car ce sont ces liens qui sont résilients et porteurs de santé. Or, jusqu’à aujourd’hui l’approche réductionniste a été trop privilégiée, menant à fractionner les systèmes alimentaires, à les optimiser artificiellement, et à supprimer toutes les parties du système agricole inutiles à cette optimisation. Le retour à une approche plus holistique consiste donc aussi à soutenir davantage l’agroécologie, l’agroforesterie, l’agriculture biologique, des techniques agricoles qui reconnaissent naturellement les liens qui unissent les parties du système.
Aujourd’hui, on ne peut donc plus parler d’alimentation sous le seul angle nutritionnel, mais de façon globale, intégrant l’agriculteur à notre santé, et à la santé globale de la planète (la « one health approach »).
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