QUELS MODÈLES AGRICOLES POUR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE ?
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A135 • Un modèle agricole pour une réappropriation du territoire
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La fracture sociale qui s’opère depuis déjà un certain temps entre le monde urbain et rural se manifeste aujourd’hui par un rejet par la population du modèle agricole. Les agriculteurs, fers de lance de ce modèle, sont en première ligne face à une population désemparée, qui fait face à un constat environnemental alarmant. Le défi à relever à présent et auquel la future PAC doit répondre est de trouver le moyen de recréer du lien entre le producteur et le consommateur.
Une première solution évidente c’est de diminuer le nombre d’intermédiaires dans les filières alimentaires. On rapproche de facto les acteurs se situant aux extrémités de la filière, les consommateurs gagnent en lisibilité, les agriculteurs reprennent une marge sur leurs productions. Soutenir le circuit court c’est soutenir la capacité des agriculteurs à transformer et diversifier leurs productions. Une exploitation agricole étant en mesure de proposer une gamme de produits diversifiée peut se positionner sur plusieurs marchés et gagne par là même en résilience et en indépendance. En effet, la contractualisation entre les agriculteurs et les industries de l’alimentaire, exigeantes en termes de calibration, réduit les premiers à un statut de sous-traitant et contribue au sentiment de non-reconnaissance du travail fourni. Il est difficile d’attendre des changements de pratiques de la part d’agriculteurs privés de leur marge de manœuvre.
La France connaît aujourd’hui un vieillissement de la population agricole. Si l’on souhaite proposer un modèle durable il faut éviter la poursuite de la restructuration et donc trouver repreneur pour éviter l’agrandissement démesuré des exploitations. Ce phénomène est en œuvre et conduit désormais à un coût d’achat trop important, empêchant les éventuelles personnes intéressées non issues du milieu agricole d’investir, l’accès de ces personnes au monde agricole doit être facilité. Trouver repreneur, inciter la nouvelle génération à s’installer c’est aussi être capable de leur assurer un revenu provenant de leur activité. Encore une fois, favoriser le circuit court et la transformation sur l’exploitation c’est donner aux agriculteurs la main sur leurs prix de vente. Être capable d’envisager l’avenir sereinement c’est pouvoir se reposer sur une exploitation résiliente, intégrant plusieurs productions, valorisées sur une diversité de marchés.
Une exploitation résiliente, c’est également une indépendance vis-à-vis des intrants. Malgré l’existence de pratiques types associations culturales capables de fixer l’azote, il apparaît difficile d’envisager une agriculture productive sans amender les sols. L’amendement organique permet à la fois de régénérer les biomes du sol, bien souvent stérile au terme de plusieurs années de pratiques intensives. On sous-estime largement les conséquences de la perte de vie dans les sols. Un changement de paradigme doit s’opérer et redonner au sol sa valeur de ressource qui, comme toute ressource, doit être gérée de façon durable. Considérer le sol comme simple support sur lequel il suffirait d’apporter des intrants inertes, dont les réserves s’amenuisent, en particulier le phosphore, n’est plus supportable pour une agriculture en quête d’autonomie. L’intégration de l’élevage dans les exploitations permet d’amender les sols en intrants organiques issus directement de celles-ci. A défaut de pouvoir l’intégrer sur les exploitations, qui n’ont pas toutes vocation à accueillir un cheptel, on doit favoriser un maillage territorial intégrant à la fois de l’élevage, du maraîchage, de la production céréalière etc… La spécialisation des territoires en bassins agricoles mono-systémiques fragilise le lien d’interdépendance des systèmes de production.
Les menaces environnementales sont connues, les solutions à la parcelle sont multiples. Pourtant aujourd’hui de nombreux freins à leur mise en place empêchent d’inverser la tendance. Subventionner des initiatives vertes c’est bien, changer le modèle agricole et faire sauter les verrous à leur déploiement à grande échelle c’est mieux.
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